Par Abdessalem Chaabane

Court-métrage “Mur et Fil” réalisé par Fatma Barkallah

Présenté cette année au FIFAK, le court-métrage “Mur et Fil”, réalisé par Fatma Barkallah, s’inscrit dans le cadre de son projet de fin d’études à l’Institut des Beaux-Arts de Nabeul. D’une durée de 22 minutes, ce film illustre avec justesse ce que l’on attend d’une production académique : une rigueur formelle et une maîtrise technique affirmée. Les films d’école se distinguent généralement par le respect des règles canoniques de la production cinématographique et par une attention particulière portée à la syntaxe audiovisuelle. Mur et Fil ne fait pas exception et pourrait même être considéré comme un “cas d’école”, tant la qualité de son exécution technique est manifeste.

Dès les premières images, on remarque un soin particulier accordé à l’image, au son et au montage, révélant une parfaite synergie entre les différents départements techniques.

Certaines séquences se démarquent par leur puissance esthétique et symbolique : la scène où le personnage féminin danse, seule sur une scène de théâtre baignée par la lumière d’un projecteur, impose une force visuelle marquante. De même, la séquence onirique, construite sur un montage rapide et saccadé, instaure un rythme singulier qui traduit l’état psychologique troublé du personnage et reflète, en filigrane, le traumatisme et la mutilation qu’elle a subis durant son enfance. Cette intensité est renforcée par une palette chromatique maîtrisée et un design sonore travaillé, deux éléments qui contribuent à la cohérence et à l’élégance globale du film.

Cependant, cette excellence formelle fait apparaître en creux une dimension dramatique plus discrète. Le choix du sujet – “tasfih”, un rituel destiné à protéger la virginité des jeunes filles – est à la fois audacieux et riche. Déjà abordé par d’autres réalisatrices, comme Nesrine Ben Maati dans “Khat Nila” (FIFAK 2018), ce thème continue d’interroger nos traditions et croyances. Si Fatma Barkallah l’aborde avec sérieux et engagement, le traitement dramatique demeure sobre et relativement linéaire, laissant parfois les personnages moins approfondis qu’on pourrait l’espérer, au regard de la densité du sujet. On devine une volonté de privilégier une narration claire et lisible, mais cette approche se fait au détriment de certaines nuances psychologiques et de la complexité dramatique.

Ces réserves ne doivent toutefois pas occulter la nature même de l’œuvre : un film d’école.

À ce titre, l’exigence de perfection dramatique doit être relativisée. L’essentiel réside ici dans la capacité à conjuguer une démarche esthétique affirmée avec un propos porteur de sens.

De ce point de vue, “Mur et Fil” s’impose comme une expérience prometteuse, où Fatma Barkallah révèle une maîtrise technique solide et un sens esthétique indéniable, des qualités précieuses pour ses projets à venir.